01 Juil
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The Art | Les enjeux de la danse « in situ »… 4/4

Avec l’événement The Art (prononcez dehors), on peut s’interroger sur l’engagement de l’artiste face à son art et face au grand public. Tout d’abord, la danse « in situ » répond-t-elle davantage à une opération de sensibilisation qu’à une démarche artistique ? À une promotion de la danse contemporaine qu’à d’une véritable réflexion sur le médium et sur son impact public ? Enfin, est-ce le rôle des artistes d’aller vers le public ?

Se positionner en tant qu’artiste

Marie Béland : Notre but au départ consistait à aller à la rencontre des gens pour leur présenter de la danse contemporaine, d’ouvrir cette discipline et de provoquer la rencontre. L’idée était aussi de se positionner en tant qu’artiste.

Maya Ostrofsky : Dans ce parc, j’avais peur de donner une mauvaise image de la danse contemporaine, c’est-à-dire l’idée du « n’importe quoi ». Je me sentais responsable.

Frédérick Gravel : En tant que chorégraphe, est-ce qu’on veut séduire, provoquer ou laisser les gens indifférents ? Proposer quelque chose de lisible, ça nous aide. Sinon, comment communiquer ? Les propositions claires fonctionnent à ce titre. Peut-on être plus clair en tant que chorégraphe ? Ou faut-il se dire que anyway ça va être pris différemment en fonction des gens ?

La « job » du spectateur

Dominique Bouchard : On prend parfois les spectateurs pour des ignares. Ils disent des choses évidentes, mais pertinentes, dans leurs mots à eux. Même quand je pensais ma proposition ratée, le public me faisait découvrir quelque chose que je n’avais pas remarqué. On peut faire un peu plus confiance au public. Ses feed back sont très positifs et très intéressants.

Espace Vert de Marie Béland, photo Maurice Pressé

Espace Vert de Marie Béland | interprètes : Vincent Morelle et Marilyne St-Sauveur | photo Maurice Pressé

Frédérick Gravel : La clarté n’est pas un dogme, ni une fonction. Katya et Marie ont proposé deux réponses différentes à la clarté. Pour Marie, tout est vert. Ce n’est pas ça qui fait le show mais c’est clair. Pour Katya, c’est voulu que ce ne soit pas clair : que les interprètes ne soient pas identifiés en tant que tels, qu’ils se confondent parmi les promeneurs du parc ou les passants de la rue. Le projet de Dominique se déroule sans musique : son espace se crée au niveau du regard. Elle ne cherche pas l’attroupement : c’est le spectateur qui fait la job. La 2e Porte à Gauche n’a pas pour but de développer le public mais d’inviter les artistes à (re)penser leur rapport au public. Cette question des objectifs est importante. On ne fait pas de la sensibilisation de public. C’est nous qui nous sensibilisons. Notre objectif n’est pas forcément de « convertir » les gens à aller au théâtre. En théâtre, on a l’illusion qu’on est capable de diriger le regard du spectateur. Dehors, on ne contrôle rien. C’est le défi de cet événement : prendre conscience que toutes les conditions de représentation changent. Quand est-ce que l’on fait des ruptures ? Aucune valeur de temps n’existe car ce n’est jamais le même début, ni la même fin pour chaque passant.

Laisser des traces dans le corps du passant

Élodie Lombardo : Notre objectif est-il de retrouver une scène théâtrale dehors ou de s’infiltrer dans la vie quotidienne ?

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Kiss d’Andrew Tay et Sasha Kleinplatz | Photo : Katya Montaignac

Sasha Kleinplatz : Le contexte est complètement différent dans la rue et dans le parc. Pour notre projet Kiss, c’était plus romantique devant la fontaine !

Dominique Bouchard : Le projet pouvait se confondre dans l’aspect physique du lieu. Pour apprécier une représentation, doit-on nécessairement immobiliser le spectateur ? Le Carré St-Louis était modifié par notre présence : ça laisse des traces dans le corps du passant.

Synthèse mise en forme par Katya Montaignac, 11/09/2006