Dans l’intimité de quatre chambres d’hôtel se dévoile l’imaginaire de quatre chorégraphes « mariés » pour l’occasion à quatre auteurs/ metteurs en scène : Catherine Gaudet et Jérémie Niel, Catherine Vidal et Frédérick Gravel, Virginie Brunelle et Olivier Kemeid, Marie Béland et Olivier Choinière. Mariage de folie ou de raison, cette union du texte et du mouvement se consomme sous l’œil voyeur du spectateur pour évoquer le couple au-delà de ses clichés. Derrière les portes de ce nouvel espace de création et de représentation se dessinent d’intrigantes rencontres artistiques, avec en filigrane le désir de questionner les liens entre la danse et le théâtre.
La 2e Porte à Gauche a dans ses gènes le goût inné de l’expérimentation et l’envie constante d’amener le public hors des sentiers battus. Ce nouvel opus ne fait pas exception et c’est l’Hôtel Le Germain Montréal qu’ils ont choisi comme nouveau territoire à investir.
Concept : La 2e Porte à Gauche (Marie Béland, Rachel Billet, Frédérick Gravel, Katya Montaignac)
La Première de Rendez-vous à l’Hôtel a eu lieu à Montréal à l’Hôtel Le Germain du 25 au 27 janvier, du 1er au 3 février 2014, avec des supplémentaires le 8 et 9 février. Une coproduction de l’Agora de la danse avec l’Hôtel Le Germain.
Le concept a ensuite voyagé en reprise à Halifax du 6 au 8 novembre 2015 à l’Hôtel ALT Halifax (40 Silver Dart Drive), avec une nouvelle auteure invitée, Marie Mougeolle. De nouveaux interprètes se sont joints à cette reprise : Peter Trosztmer, Esther Rousseau Morin, Guillaume Rodrigue, Francis La Haye.
Enfin, le spectacle a voyagé à Ottawa à l’Hôtel ALT Ottawa (185 Slater Street), le 10 et 11 juin 2016 dans le cadre du Festival Danse Canada. L’interprète Susan Paulson s’est jointe à la distribution lors des représentations.
« Dans cet espace confiné où les spectateurs sont assez près des interprètes pour les toucher, on peut atteindre un niveau d’intimité pratiquement impensable dans le cadre d’une salle de théâtre conventionnelle. » – Victor Swoboda, The Gazette.
Laboratoires publics
En attendant, les spectateurs ont été invités à découvrir le fruit de ces rencontres artistiques qui explorent le lien danse/théâtre à travers 4 laboratoires publics :
COUPLE # 3 : Frédérick Gravel & Catherine Vidal
Vendredi 13 décembre 2013 à 20h
Maison de la culture Frontenac (2550 Ontario Est)
2014 rendez-vous a l hotel_chambre 406_creation catherine vidal-frederick gravel_interpretation emmanuel schwartz et peter james
Résultats, questions et incertitudes : à ce moment-ci, l’équipe sait seulement qu’elle aime jouer avec les couches de réalité et de fiction, avec l’ambiguïté et la surprise, et qu’elle s’intéresse à ce qui se passe après la fête.
Interprètes : Peter James et Emmanuel Schwartz
COUPLE # 2 : Virginie Brunelle & Olivier Kemeid
Maison de la culture du Plateau Mt-Royal Jeudi 28 novembre 2013 à 20h
2014 rendez-vous a l hotel_chambre 408_creation virginie brunelle-olivier keimed_interpretation marc beland et isabelle arcand
Un homme seul dans une chambre d’hôtel. Il attend quelqu’un – une femme sans doute. Il s’adonne au rituel de la préparation, de l’attente amoureuse, fiévreuse, impatiente. La femme tarde. L’homme s’active. La femme ne vient pas. Le rituel devient celui de l’absence.
« Par trois fois, il tenta de l’entourer de ses bras; par trois fois en vain il a saisi l’image qui lui échappe des mains. » (Virgile)
Interprètes : Isabelle Arcand et Marc Béland
COUPLE #1 : Jérémie Niel & Catherine Gaudet
Maison de la culture Villeray/Saint-Michel/Parc Extension Mercredi, 20 novembre 2013, 20h
2014 rendez-vous a l hotel_chambre 306_creation catherine gaudet-jeremie niel_interpretation francis ducharme et clara furey
Clara Furey et Francis Ducharme sont Roméo et Juliette.
Relecture libre d’un amour impossible.
« Le chagrin assoiffé boit notre sang. Adieu, adieu. » (William Shakespeare)
Théâtre | Danse | 40 minutes 22, 23, 24 octobre 2013 à 18 h 30
Laboratoire de l’Agora de la danse, 840 rue Cherrier
28 mai 2013 à 18h et 21h et 29 mai 2013 à 21h Théâtre d’Aujourd’hui, Salle Jean-Claude Germain
2014 rendez-vous a l hotel_chambre 307_creation marie beland-olivier choiniere_interpretation mathieu gosselin et marilyne st-sauveur
La première fois que Marie Béland a rencontré Olivier Choinière, elle lui a apporté des macarons. Et lui a enregistré leur conversation. Quand le théâtre a rendez-vous avec la danse…Déjà présentée lors du MIXOFF de l’édition 2013 du OFFTA, la confrontation de ces deux univers artistiques qui s’opposent autant qu’ils s’épousent déjoue les clichés du couple dans toutes ses variantes et toutes ses formes.
Création et interprétation : Marie Béland et Olivier Choinière
Œil extérieur : Katya Montaignac Informations
Merci au Conseil des Arts du Canada pour son soutien
« Le regroupement de danse atypique La 2e Porte à Gauche s’investit dans le mariage de la danse et du théâtre à travers l’illustration du concept du couple».
« le prolifique collectif La 2e Porte à Gauche s’attaque au couple danse-théâtre en mariant sur scène l’univers de chorégraphes et metteurs en scènes ».
« Il y a de ces concepts que l’on souhaite ardemment éviter, parce qu’ils nous fatiguent par leur banalité, mais surtout par leurs débouchés inévitablement clichés. Pourtant, là se dirige tout le propos pour Marie Béland et Olivier Choinière dans ce projet présenté par La 2e Porte à Gauche. Il s’agit d’extirper de ces thèmes déjà trop de fois abordés, une absurdité enfantine, une essence artistique, voire même, un désir d’éveil collectif. De grandes idées qui seront, au plaisir des gens qui regardent et qui écoutent, savamment investiguées ».
« En tant que spectateur, le sentiment de devenir un invité privilégié s’installe graduellement en nous grâce, entre autres, aux enregistrements réalisés par Olivier Choinière durant ses premiers rendez-vous avec la chorégraphe. De par ces conversations intimes entre eux on nous accorde un accès de premier choix aux réflexions qu’ont actuellement chacun d’eux quant à leur médium artistique ».
Rendez-vous à l’hotel, bande-annonce de l’Agora de la danse.
Les interprètes Peter Trosztmer et Guillaume Rodrigue parlent de leur expérience comme membres de la distribution de Rendez-vous à l’hôtel en tournée. Dans cette œuvre unique, les spectateurs passent d’une chambre à l’autre pour assister aux pièces, d’une durée de 20 minutes chacune, présentées à l’Hôtel ALT à Ottawa dans le cadre du Festival Dance Canada.
2050 Mansfield / Entrevues audio, Rencontre à l’aveugle,
Voir,
Philippe Couture, 20 janvier 2014
2050 Mansfield – Rendez-vous à l’hôtel,
La Bible urbaine,
Marie-Ève Beausoleil,21 janvier 2014
Four rooms with a view,
The Gazette,
Victor Swoboda, 24 janvier 2014
« Nuit clos » sur le couple,
Le Devoir,
Frédérique Doyon, 25 janvier 2014
La 2e Porte à Gauche : Rendez-vous à l’hôtel,
24 Heures,
Marie-Hélène Chartrand, 26 janvier 2014
Le plaisir ambigu du voyeur,
La Presse,
Aline Apoltolska, 27 janvier 2014
Brouiller le désir et le rôle du spectateur,
Le Devoir,
Frédérique Doyon, 27 janvier 2014
Danse de chambre,
La Bible urbaine,
Marie-Ève Beausoleil,28 janvier 2014
Le voyeurisme encouragé,
Voir,
Philippe Couture, 28 janvier 2014
Pour voyeurs avertis,
Dfdanse,
Iris Gagnon-Paradis, 29 janvier 2014
2050 Mansfield : Chambres fortes,
revue JEU,
Christian Saint-Pierre, 2 février 2014
2050 Mansfield : un « speed dating » entre la danse et le théâtre,
bouclemagazine.com,
Valery Drapeau, 2 février 2014
4×2 – Vues sur chambres d’hôtel,
dancefromthemat.com,
Nayla Naoufal, 3 février 2014
Naoufal, N. (2014). Compte rendu de [2050 Mansfield – Rendez-vous à l’hôtel, La
2e Porte à Gauche, hôtel Le Germain, Agora de la danse, Montréal, du 25
janvier au 9 février 2014]. esse arts + opinions, (81), 137–137.
Mougeolle, M. (2014). Quand danse et théâtre s’éprouvent l’un l’autre. Jeu, (152), 64–67.
Live Art opens closed doors at hotel _ The Chronicle Herald
Chambre 406 : en répétition, Emmanuel Schwartz et Peter James mis en scène par Frédérick Gravel et Catherine Vidal, montage vidéo de Peter MacCabe pour The Montreal Gazette.
Catherine Gaudet et Jérémie Niel jouent du couple danse/théâtre en se jouant des archétypes. Danse et Théâtre sont des personnages à part entière, personnifiés par ce qui les définit dans l’imaginaire collectif. La musique de Prokoviev est Danse, le texte de Shakespeare est Théâtre, et entre eux ça se passe plutôt bien.
Aussi, en substance, danse et théâtre (sans majuscules cette fois) sont alliés et complice chez Gaudet et Niel. L’un et l’autre s’infiltrent mutuellement tout en se faisant place, apparaissant alors de manière plus évidente. Se laissant apparaître. Comme si ce couple là se connaissait déjà suffisamment pour laisser exister l’autre tout en relevant le défi de l’alliance. (J’irai plus du côté de l’alliance que de l’alliage ici, bizarrement. L’alliage, c’est peut-être plus chez Béland et Choinière).
Ce vieux couple Danse Théâtre pas rabougri, qui continue d’inventer son quotidien, est porté par un couple enfantin : Francis Ducharme et Clara Furey incarnent Roméo et Juliette dernière génération, qui cherchent entre amour et franche camaraderie le chemin d’un partage. Roméo et Juliette jouent à Roméo et Juliette, jouent à la romance fraîche et frétillante comme à la mort des amants, à la perte de l’autre, à la passion destructrice. Et on est pris au jeu.
La complicité des interprètes y est pour beaucoup. Francis Ducharme et Clara Furey jouent ensemble sur scène un jeu qu’ils connaissent et dont ils rient depuis longtemps, semble-t-il. En tous cas ils s’amusent l’un de l’autre et de concert, se cherchent comme des enfants qui se courent après, se retrouvent avec l’innocence du jeu terminé. Conciliés, riants, charmés, et assez charmants.
Roméo et Juliette s’aiment ici comme des enfants, pas besoin d’une fin cruelle.
Béland et Choinière
Chez Marie Béland et Olivier Choinière, le cinéma s’invite, et le kitch aussi. Drôles de partenariats. Danse et théâtre sont ici plus infiltrés. C’est performatif, vivant, et on interagit de présences à présences. Tantôt spectateur tantôt acteur improvisé, rien ni personne ne reste à sa place. On est dans l’alliage pur, où l’on n’identifie plus qui mène la danse. À plusieurs niveaux d’ailleurs…
L’espace est en constant mouvement, et l’histoire qu’on nous raconte à coups de films ultra quétaines et mal doublés nous file entre les doigts, alors qu’on la connaît si bien. Rassurons nous, elle n’a rien à voir avec la structure bien établie et attendue de la comédie romantique à laquelle on voudrait bien nous faire croire. C’est celle d’un couple (incarné par Marilyne Saint-Sauveur et Mathieu Gosselin) usé par le temps et le monde dans lequel il vit, par le quotidien et ses routines. Le fossé se creuse entre deux personnages qui éprouvent le perpétuel recommencement d’une vie en décalé. Ils se lèvent en décalé, se couchent en décalé, parlent en décalé, s’embrassent en décalé, et ne sont finalement jamais tout-à-fait eux mêmes. C’est leur carcan qui leur ôte les mots de la bouche.
Nous, on est spectateurs impuissants de la bérézina annoncée. Pris à témoin, on se retrouve aussi coincés qu’eux dans leur monde qui n’à plus ni queue ni tête. Ça n’a plus de sens, et c’est drôle. Absurdité totale d’un couple qui se noie dans la vie qu’il a si soigneusement construite, qui devrait être sous contrôle. Leur jeu, finalement, c’est de s’en échapper, de mettre les autres à leurs places, de leur faire jouer leur rôle pour que chacun puisse éprouver à quel point la figure du couple, plus sociale ici, peut construire une façade. Pour que chacun puisse, surtout, au moins en rire. Ça goûte le fake, mais ça goûte bon.
Brunelle et Kemeid
Ça danse plus que ça ne théâtre à première vue – vue naïve, vue qui veut voir.
En fait, Virginie Brunelle et Olivier Kemeid s’en foutent. La question ne se pose pas. Olivier le dira même : il n’y a aucune différence. Dans le faire, c’est la même chose. Alors qu’on danse ou que l’on théâtre, on proposera simplement des images, des moments, des expériences. Au bon vouloir de la vue, des tripes ou tout autre de voir, sentir, ou même juger. Tant que le jugement goûte, après tout, pourquoi pas.
Le spectateur est ici libre de réinventer l’histoire. D’imaginer le meilleur et le pire, tant la situation qui s’offre à lui reste ouverte. Peu de texte pour enfermer les suppositions dans des mots, et une danse qui intervient, comme ça, pour encourager l’imaginaire. La danseuse incarne la femme fantasmée, désirée ou espérée, et la danse devient alors symbole de l’impalpable. De ce qui échappe à l’autre chez l’être qu’il aime, ou ce qui appartient encore de liberté, en revers, à l’être aimé. Pas de jeu réciproque ici, simplement deux solitudes qui se jaugent plus qu’elles ne se jugent. Deux parcours parallèles, inconciliables. Deux solitudes, deux absences, deux mondes dans un même espace. Les metteurs en scène ont choisi qu’Elle (Isabelle Arcand) était plus absente que Lui (Marc Béland). Pour ma part je ne suis pas sûre. Car on a beau nous raconter une histoire, on sait bien que tout un chacun, têtu qu’il est, fera bien ce qu’il veut. C’est là pour moi toute la richesse de cette proposition, éminemment poétique.
Olivier K : « Le souvenir entretient une fusion, parfois malgré nous ».
Gravel et Vidal
De l’insaisissable. Ça cherche à créer.
Il n’est pas question de chercher la danse ici. Cette chambre là est une scène – scène au sens quotidien du terme – scène de vie, scène de crime, de passion, de heurts en tous genres. Où il se passe des trucs, comme dans la vie, mais en un peu moins vrai ou vraisemblable. Le lieu délivre ses indices, les personnages aussi. On part d’architectures (de corps ou de dramaturgie), et on re-act. On recrée, en rewind, ce qui a pu nous mener là. Ni danse ni théâtre donc, mais bien des jeux et des situations à créer et imaginer. Donc à la fois danse et théâtre. On se nourrit du rien ou du pas grand chose, on avance à tâtons, qu’on soit créateur, acteur ou spectateur. Cette chambre là est la plus risquée, ou celle qui nous risque le plus. Ça dépend du point de vue.
Peter James et Emmanuel Schwartz jouent ce couple d’hommes. Et c’est passionnel entre eux, ça c’est sûr. On est même dans l’exagération, dans l’amour à la folie qui mène au désamour. Autant en rire. L’absurde prend un goût d’humour anglais, à la fois trash et léché, à la fois fin et grossier. Dans les zones grises finalement.
2050 Mansfield, rendez-vous à l’hôtel
C’est un parcours. Ou une multiplicité de parcours. De chambre en chambre, nous ne sommes pas le même spectateur. Tantôt voyeur, tantôt enquêteur, témoin ou acteur plus ou moins malgré nous, l’expérience est toujours à réévaluer. Les formes proposées sont autant de mises en abîme du couple, mais aussi du couple danse-théâtre. Autant de délocalisations de l’un comme de l’autre, de questions l’un sur l’autre. Autant de manières de faire, de voir et de faire voir. Mais aussi des créers et des vivres ensemble. Un couple de créateur qui se penche sur le couple avec un couple de savoir-faire, ça donne à penser. Le tout multiplié par quatre univers, ça donne un parcours poétique singulier qui interroge à plein d’endroits. Quand y a-t-il danse ou théâtre ? Et cette fameuse figure du duo ? Et ce que la danse dit du couple ? Comment créer à plusieurs ? Comment et pourquoi déjouer les archétypes ? Et qu’est-ce que j’en dis, moi ? 2050 Mansfield est aussi un spectacle sur le spectacle, un spectacle sur la création.